Tribunal des Conflits, 10 janvier 2022, n°C4230, mentionné dans les tables du recueil Lebon[1].

La RATP agissant comme coordonnateur d’un groupement de commandes incluant SNCF mobilités[2] a publié un avis d’appel public à la concurrence le 26 juin 2018. Un tel avis devait permettre la mise en œuvre d’une procédure négociée pour la passation d’un accord-cadre à bons de commande relatif à « l’étude et la fourniture de matériels roulants à destination de la ligne B du RER ».

Or, la société Alstom Transports – ayant participé aux négociations et remis une offre finale le 22 juin 2019 – a saisi le juge des référés précontractuels du tribunal judiciaire de Paris. Celui-ci a donc adressé au groupement de commandes, d’une part, des injonctions ayant trait à la méthode d’analyse des offres ainsi qu’à l’information des candidats et, d’autre part, a écarté l’exception d’incompétence au profit du juge administratif lors d’un jugement en date du 17 décembre 2020. Toutefois, la Cour de cassation, saisie d’un pourvoi de la RATP, s’est tournée vers le Tribunal des Conflits afin de trancher la question de la juridiction compétente.

Tout d’abord, l’arrêt rappelle que la passation et l’attribution des contrats régis par le code de la commande publique peuvent faire l’objet d’une procédure de référé précontractuel devant le juge administratif ou le juge judiciaire eu égard respectivement à la nature administrative ou privée dudit contrat. En outre, la détermination de cette nature confère au juge du référé précontractuel la capacité de conclure s’il a été saisi à bon droit.

Ensuite, le Tribunal des Conflits précise que la compétence du juge administratif en matière de référé précontractuel est avérée lorsque la procédure implique un groupement de commandes composé d’acheteurs de différentes natures – dont l’un est une personne publique susceptible de conclure un marché public qui sera un contrat administratif[3] – ayant pour objectif la passation d’un ou plusieurs contrats et possédant un coordonnateur pour mener à bien la procédure de passation[4]. Néanmoins, le juge judiciaire peut connaître des litiges postérieurs à la conclusion des contrats ayant un caractère de droit privé.

Ainsi, la procédure de passation litigieuse doit être examinée devant le juge administratif puisque la RATP est un établissement public susceptible de conclure des contrats administratifs, qu’elle coordonne et organise la passation du marché dans le cadre du groupement avec SNCF mobilités.

Carole Koteira.

 

 

[1]https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000044928198?init=true&page=1&query=&searchField=ALL&tab_selection=cetat

[2] Il s’agit ici de deux établissements publics à caractère industriel et commercial dont l’un est devenu depuis le 1er janvier 2020 la société SNCF Voyageurs.

[3] Selon l’article 3 de l’ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics et en l’espèce applicable : « Les marchés publics relevant de la présente ordonnance passés par des personnes morales de droit public sont des contrats administratifs ».

[4] Selon l’article 28 de l’ordonnance n°2015-899 du 23 juillet 2015 relative aux marchés publics et en l’espèce applicable : « I. – Des groupements de commandes peuvent être constitués entre des acheteurs afin de passer conjointement un ou plusieurs marchés publics.
Un groupement de commandes peut également être constitué, aux mêmes fins, entre un ou plusieurs acheteurs et une ou plusieurs personnes morales de droit privé qui ne sont pas des acheteurs soumis à la présente ordonnance, à condition que chacun des membres du groupement applique, pour les achats réalisés dans le cadre du groupement, les règles prévues par la présente ordonnance.
II. – La convention constitutive du groupement, signée par ses membres, définit les règles de fonctionnement du groupement. Elle peut confier à l’un ou plusieurs de ses membres la charge de mener tout ou partie de la procédure de passation ou de l’exécution du marché public au nom et pour le compte des autres membres
 ».

Leave a Comment