Conseil d’Etat, 9 novembre 2021, Communauté d’agglomération du Pays Basque, Communauté d’agglomération du Grand Montauban et Mont-de-Marsan agglomération, n°s 438388, 438389, 438408 (mentionné aux tables du Lebon)
Le juge administratif opère un contrôle de qualification juridique des faits constitutifs d’un vice du consentement pouvant affecter la validité d’un contrat.
Dans le cadre de la loi de programmation du 3 août 2009, la ligne ferroviaire à grande vitesse Sud Europe Atlantique (LGV SEA), a été définie[1]. Elle est constituée de plusieurs tronçons dont le tronçon central Tours-Bordeaux, achevé en 2017, et d’autres tronçons qui demeurent toujours aujourd’hui à l’état de projet. La réalisation et l’exploitation du tronçon central prend la forme d’une concession à un opérateur privé, financée par Réseau Ferré de France (RFF) devenu par la suite SNCF réseau. Ce dernier ne pouvant financer seul de tels investissements, une convention de financement a été signée, réunissant notamment l’Etat et une trentaine de collectivités territoriales et prévoyant des versements par tranches. Une quinzaine de collectivités ont cependant cessé leurs versements à partir de 2012. Ce qu’elles ont justifiées par le fait que toutes les collectivités approchées n’avaient pas conclu la convention et (en réalité) par les déclarations de responsables de l’Etat indiquant que la réalisation des autres tronçons était repoussée. SNCF Réseau a alors demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner les collectivités à lui verser les sommes en exécution de la convention. Toutes condamnées en première instance et en appel, trois d’entre-elles se sont pourvues en cassation.
Si la recevabilité de leur demande en première instance n’a pas posé de problème, les collectivités invoquaient un vice de consentement, leurs engagements n’ayant été pris selon elles qu’en considération de ceux pris par l’Etat et RFF de réaliser le tronçon. Elles estiment que la clause relative à l’obligation de contribuer financièrement, non subordonnée à sa réalisation, serait dépourvue de cause. Elles ont également estimé que leur consentement a été vicié alors que seule une partie des collectivités ont finalement signé la convention de financement. Le Conseil d’Etat a estimé que la Cour administrative d’appel de Paris n’avait pas dénaturé les pièces du dossier ni commis d’erreur de qualification juridique des faits en écartant les moyens tirés de l’erreur d’appréciation de la cause de l’engagement contractuel des collectivités requérantes. Le Conseil d’Etat examine si un vice du consentement, et en l’espèce un vice d’une particulière gravité, est caractérisé au sens de sa jurisprudence Commune de Béziers 1[2] en opérant un contrôle de qualification juridique des faits d’une clause contractuelle. Comme il l’avait indiqué notamment dans ses arrêts du 10 juillet 2013, Cne de Vias (n°362304) et du 20 décembre 2017, Sté Area Impianti (n°408562), il lui appartient, lorsqu’il constate des irrégularités, d’en apprécier l’importance et les conséquences et par là si la poursuite de l’exécution du contrat est possible ou non.
[1] Loi n°2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement
[2] Conseil d’Etat, Assemblée, 28 décembre 2009, Commune de Béziers