CE, 5 novembre 2021, n°444625, ministre de l’Économie c/ Société Huissiers Partner Conseil
Par un arrêt du 5 novembre 2021, le Conseil d’Etat a jugé que le défaut de publication au registre du commerce et des sociétés (RCS) d’un changement dans la composition d’un groupement d’intérêt économique (GIE) n’entachait pas par lui-même la régularité de la candidature de ce groupement à l’attribution d’un marché public.
La direction départementale des finances publiques du Cher a conclu avec le GIE Groupement des poursuites extérieures, ci-après GIE GPE, un marché ayant pour objet l’intervention des huissiers de justice dans le recouvrement amiable des créances prises en charge par les comptables de cette direction.
La société Huissiers Partner Conseil, dont l’offre a été rejetée, conteste l’attribution de ce marché au GIE GPE, qui serait entaché d’irrégularité en raison de l’absence de mise à jour du RCS à la date de signature du contrat, alors que la composition du groupement avait fait l’objet d’un changement. Elle demande donc, entre autres, la réparation du préjudice tiré de son éviction irrégulière. Après avoir essuyé un refus sur ce point devant le Tribunal administratif d’Orléans [1], la Cour administrative d’appel de Nantes [2] lui a donné raison. L’affaire a ensuite été portée devant le Conseil d’Etat par le ministre de l’Économie, des finances et de la relance.
La haute juridiction commence par rappeler que les GIE sont soumis une obligation d’immatriculation au RCS [3], et, comme toute personne immatriculée, sont tenus de procéder à une modification dans le mois suivant tout fait ou acte qui rendrait nécessaire la rectification ou le complément des mentions de l’immatriculation.[4]
En l’espèce, par acte du 31 octobre 2016, la SCP Richard Lamagnère Coudray Chevalier est devenue membre du GIE GPE. Or, ce changement n’a pas fait l’objet d’une publication au RCS telle qu’imposée par le Code de commerce avant la signature du marché le 4 avril 2017.
En se basant sur l’article L.123-9 du Code de commerce, le Conseil d’Etat énonce d’abord qu’une personne soumise à immatriculation au RCS ne peut pas opposer aux administrations publiques les faits et actes sujets à mention dans ce registre et qui n’y ont pas été publiés. Avant d’ajouter : « En revanche, l’administration peut, lorsqu’elle en a connaissance, se prévaloir de ces faits et actes alors même qu’ils n’ont pas fait l’objet d’une telle publication. » Par conséquent, le simple défaut de publication au RCS d’un changement dans la composition du GIE candidat au marché public ne fait pas obstacle à ce que l’attributaire prenne en compte ce changement lorsqu’il en a connaissance. Le juge adopte ainsi une position assez souple en considérant que ce défaut de publication du changement de composition du GIE, intervenant pourtant en méconnaissance du Code de commerce, n’entache pas par lui-même la régularité de sa candidature à l’attribution du marché.
Partant, la société Huissiers Partner Conseil n’était pas fondée à demander l’indemnisation du préjudice tiré de son éviction irrégulière.
Clarysse Simonot
[1] TA Orléans, 18 octobre 2018, n° 1703019
[2] CAA Nantes, 17 juillet 2020, n° 18NT04492
[3] Article R. 123-36 Code de commerce
[4] Article R. 123-66 Code de commerce