CE, 13 novembre 2020, Commune de Perpignan, n°439525

Le Conseil d’Etat s’est prononcé, le 13 décembre 2020, concernant le DQE – détail quantitatif estimatif – dans le cadre d’un marché à prix unitaire pour des prestations différentes. Dans une telle hypothèse de marché, il résulte de cette jurisprudence que le pouvoir adjudicateur doit tenir compte, de manière distincte, des quantités prévisionnelles de chacune des prestations. 

Rappelons que le marché à prix unitaire est celui qui, pour déterminer le montant du règlement, multiplie la quantité effectivement livrée ou exécutée. Le DQE, outil comparatif de prix, permet à l’acheteur de donner des quantités approximatives à mettre en œuvre pendant le marché. Depuis 2011[1], il lui est possible, afin d’évaluer le montant des offres, de procéder à une simulation. Celle-ci consiste à multiplier les prix unitaires proposés par les candidats par le nombre d’interventions envisagées, et constitue une méthode de notation des offres quant à l’évaluation du critère du prix.

C’est cinq ans plus tard, en 2016[2], que le juge fixe plusieurs conditions à son emploi. Bien que le DQE n’est pas communiqué aux candidats de manière obligatoire, les simulations réalisées doivent correspondre à l’objet du marché et le choix du contenu de cette simulation ne peut avoir pour effet de privilégier un aspect particulier de telle façon que le critère prix serait dénaturé. Il va sans dire que la même simulation doit être utilisée pour tous les candidats au marché. 

En 2020, le Conseil d’Etat rappelle, en son neuvième considérant, le principe selon lequel « Le pouvoir adjudicateur définit librement la méthode de notation pour la mise en œuvre de chacun des critères de sélection des offres qu’il a définis et rendus publics. Toutefois, une méthode de notation est entachée d’irrégularité si, en méconnaissance des principes fondamentaux d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures, elle est par elle-même de nature à priver de leur portée les critères de sélection ou à neutraliser leur pondération et est, de ce fait, susceptible de conduire, pour la mise en œuvre de chaque critère, à ce que la meilleure note ne soit pas attribuée à la meilleure offre ou, au regard de l’ensemble des critères pondérés, à ce que l’offre économiquement la plus avantageuse ne soit pas choisie. » En l’espèce, il censure la procédure de passation d’un marché passé en plusieurs lots, au motif que la Commune de Perpignan, coordinateur du groupement, avait additionné les neufs prix unitaires proposés par les candidats pour les prestations faisant l’objet de l’accord-cadre et ce, « sans leur appliquer aucune pondération ni tenir compte des quantités prévisionnelles de chacune des prestations demandées ». Cette méthode de notation aboutissait à ce que l’offre proposant la somme des prix unitaires la plus basse se voyait attribuer la meilleure note, les autres offres étant notées en fonction de leur écart à l’offre la mieux disante. 

Le juge estime ainsi que cette méthode de notation a pour effet de renforcer l’importance relative des prix unitaires les plus élevés dans l’évaluation du critère du prix alors même que le nombre prévisible de prestations correspondantes était faible. Cela conduit ainsi à priver de sa portée ce critère dans la mesure où la meilleure note n’est potentiellement pas attribuée à la meilleure offre sur ce critère. La Commune de Perpignan a, de ce fait, méconnu ses obligations de publicité et de mise en concurrence.

Il résulte du Considérant 11, que lors de l’analyse des offres, le pouvoir adjudicateur ne peut simplement additionner le montant des prix unitaires du BPU – bordereau des prix unitaires – lorsqu’il procède à l’évaluation du critère prix. Il est nécessaire de l’apprécier en fonction du lot en question, sous peine de commettre une illégalité, ce en tenant compte des quantités prévisionnelles de chacune des prestations demandées. En effet, la société requérante était un candidat évincé proposant des prix unitaires plus faibles que ceux de l’attributaire du marché concernant notamment le lot consultations juridiques simples et complexes. Sans appliquer une telle méthode de notation, la société requérante aurait obtenu la meilleure note sur le critère du prix, et, compte tenu du faible écart avec la société attributaire qui était de 0,1 point, elle aurait remporté le marché. Ainsi, il en résulte qu’un tel manquement aux obligations de publicité et mise en concurrence a lésé le candidat évincé en modifiant l’ordre de classement des candidats. La société est de ce fait fondée à demander l’annulation de la procédure de passation, notamment au stade de l’examen des offres.

Par Ananova Lohmann

Le 13/12/2020


[1] CE, 2 août 2011, Syndicat mixte de la vallée de l’Orge aval, n° 348711

[2] CE, 16 novembre 2016, Sté SNEF et Ville de Marseille, n°401660

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