Précision sur l’application aux avenants de la jurisprudence Tarn et Garonne
CE, 7ème et 2ème chambres réunies, 20 novembre 2020, Association Trans’Cub, requête n° 428156
Bordeaux Métropole a concédé un service public de l’eau potable et de l’assainissement à la société Lyonnaise des eaux, pour une durée de trente ans à compter du 1er janvier 1992. Des avenants sont venus modifier ledit contrat de délégation de service public en 2006, en 2009 et en 2012. Une association a alors formé un recours pour excès de pouvoir contre les délibérations relatives aux avenants, recours qui sera rejeté par le tribunal administratif puis par la Cour administrative d’appel de Bordeaux.
Selon le délégataire, seul un recours en plein contentieux était envisageable, dans le cas d’espèce, et non un recours pour excès de pouvoir.
Le Conseil d’Etat a saisi cette opportunité pour préciser les modalités d’application de la jurisprudence Tarn et Garonne aux avenants venant modifier les contrats.
En effet, si la jurisprudence Tarn et Garonne rendue par le Conseil d’Etat le 4 avril 2014 n’a pas d’effet rétroactif et par conséquent, ne s’applique pas aux contrats passés avant cette date, l’arrêt Association Trans’Club rendu ce 20 novembre 2020 vient préciser les modalités d’application aux avenants signés après cette date et ce, même dans le cas où ils viendraient modifier un contrat passé antérieurement à la décision de 2014.
Rappelons tout d’abord qu’en 2014, le Conseil d’Etat a permis aux tiers, autres que les candidats évincés au contrat[1], d’exercer un recours plein contentieux afin de contester la validité d’un contrat, dès lors qu’ils étaient lésés dans leurs intérêts. Néanmoins, les juges du Palais-Royal refusent d’accorder l’effet rétroactif à ce recours pour des impératifs de sécurité juridique « tenant à ce qu’il ne soit pas porté une atteinte excessive aux relations contractuelles en cours ». En effet, ce recours formé par les tiers ne peut l’être qu’à l’encontre des contrats conclus à compter du jour de la décision du 4 avril 2014[2].
Toutefois, par la présente décision, le Conseil d’Etat vient préciser que « dans le cas où est contestée la validité d’un avenant à un contrat, la détermination du régime de la contestation est fonction de la date de signature de l’avenant, un avenant signé après le 4 avril 2014 devant être contesté dans les conditions prévues par la décision n° 358994[3] quand bien même il modifie un contrat signé antérieurement à cette date ». En d’autres termes, le Conseil d’Etat n’ouvre toujours pas la possibilité de contester la validité d’un contrat conclu antérieurement à la jurisprudence Tarn et Garonne mais seulement celle de contester une modification par avenant signée postérieurement à cette date.
Dans ces conditions, c’est bien l’avenant en lui-même qui peut être contesté et non pas le contrat, à condition qu’il soit postérieur à la jurisprudence Tarn et Garonne.
Par Romana Kharfouchi
Le 10/12/2020
[1] CE, ass., 16 juill. 2007, n° 291545, Société Tropic travaux signalisation
[2] CE, ass., 4 avril 2014, n°358994, Tarn et Garonne
[3] CE, ass., 4 avril 2014, n°358994, Tarn et Garonne
Note particulièrement intéressante au demeurant
Merci !