Précisions sur un contrat conclu entre une personne publique et une personne privée : la seule présence d’une clause exorbitante du droit commun au profit de la personne privée ne caractérise pas, en elle-même, l’administrativité du contrat.

Tribunal des conflits, 2 novembre 2020, Société Eveha, n° C4196

Après rejet par le Tribunal administratif de Marseille d’une demande d’un candidat évincé de l’attribution d’un marché public, la Cour d’appel fut saisie et a renvoyé le litige au Tribunal des conflits (TC) afin qu’il détermine l’ordre juridique compétent pour connaître d’un contrat conclu entre une personne morale de droit privé, la société publique locale d’aménagement (SPLA), et une personne morale de droit public, l’Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP). Ce contrat, conclu dans le but de réaliser des fouilles archéologiques préventives préalable à la construction d’une zone d’aménagement concertée, présentait la spécificité de comporter des clauses exorbitantes du droit commun, et plus précisément le pouvoir de résilier unilatéralement le contrat pour motif d’intérêt général, conclues au profit de la personne morale de droit privé.

Dans l’arrêt du 2 novembre 2020, le Tribunal des conflits rappelle que l’archéologie préventive relève d’une mission de service public confiée à l’Institut national de recherches archéologiques préventives (INRAP), établissement public national à caractère administratif. Ensuite, le Tribunal des conflits rappelle un principe qu’il avait déjà énoncé en 2014 selon lequel « un contrat passé entre une personne publique et une personne privée qui comporte une clause qui, notamment par les prérogatives reconnues à la personne publique contractante dans l’exécution du contrat, implique, dans l’intérêt général, qu’il relève du régime exorbitant des contrats administratifs, est un contrat administratif »[1].

Mais, le caractère inédit de cette décision réside dans le fait que le TC ait précisé qu’en l’espèce, l’existence de telles clauses au seul bénéfice de la personne morale de droit privé « n’est pas de nature à faire regarder ce contrat comme administratif ». Plus précisément, le seul fait que le contrat comporte des clauses exorbitantes de droit commun au profit de la SPLA en tant que personne privée « n’est pas de nature à faire regarder ce contrat comme administratif puisque les prérogatives en cause sont reconnues à la personne privée contractante et non à la personne publique ».

Le Tribunal des conflits a néanmoins conclu à la présence d’un contrat administratif en l’espèce au regard de la nature des missions confiées à l’INRAP, à savoir la réalisation de fouilles relevant du service public de l’archéologie préventive, mission qui revêt la qualification de travaux publics et implique donc que le litige relève de la compétence du juge administratif.

Par Kenza Hamdouch

Le 24/11/2020


[1] TC, 13 octobre 2014, Société AXA France IARD c/ MAIF, n° C3963

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