CE, 13 novembre 2020, n°432791, Inédit au recueil Lebon

Le Code de la Commande publique impose aux pouvoirs adjudicateurs de vérifier que les offres qu’ils reçoivent ne sont pas anormalement basses. Une offre anormalement basse étant définie comme celle dont « le prix est manifestement sous-évalué et de nature à compromettre la bonne exécution du marché »[1].

Aussi, lorsque l’acheteur constate qu’une offre semble être anormalement basse, celui-ci est tenu de demander à l’entreprise d’apporter des justifications pour en apprécier la pertinence. Ce n’est seulement qu’après avoir pris connaissance des éléments apportés par le candidat, dans le respect du principe du contradictoire, que le pouvoir adjudicateur décidera ou non de rejeter l’offre. L’obligation de rejet d’une telle offre découle du principe d’égalité entre les candidats à l’attribution d’un marché public prévu par l’article L.3 du Code de la Commande publique[2].

Dans sa décision du 13 novembre 2020, le Conseil d’Etat rappelle que le candidat dont l’offre aurait été écartée de manière irrégulière en étant considérée comme anormalement basse doit être indemnisé.

Le seul motif que le prix d’une offre est bas n’est pas de nature à la considérer comme anormalement basse

Si un pouvoir adjudicateur souhaite rejeter une offre qu’il considère comme anormalement basse, le Conseil d’Etat rappelle que ce n’est que « si les précisions et justifications apportées ne sont pas suffisantes pour que le prix proposé ne soit pas regardé comme manifestement sous-évalué et de nature, ainsi, à compromettre la bonne exécution du marché »[3].

Or, il considère dans le cas d’espèce que la Cour administrative d’appel « n’a pas dénaturé les pièces du dossier en estimant que la société […] avait apporté les justifications suffisantes pour permettre au pouvoir adjudicateur de vérifier que son offre n’était pas manifestement sous-évaluée »[4], il indique ainsi que le seul motif que le prix d’une offre soit faible, ne saurait justifier qu’elle soit rejetée en raison de son caractère anormalement bas.

Le rejet irrégulier d’une offre ouvre droit à indemnisation

Le Conseil d’Etat considérant que la juridiction d’appel n’a pas commis d’erreur en estimant les justifications apportées par le soumissionnaire comme suffisantes, en déduit que le rejet de l’offre par le pouvoir adjudicateur est irrégulier.

Ainsi, la Haute juridiction confirme la solution retenue par la Cour selon laquelle l’éviction irrégulière d’un candidat au motif que son offre serait anormalement basse alors que celle-ci ne l’est pas, eu égard aux justifications suffisantes que ce dernier a proposé, constitue un préjudice qui ouvre droit à indemnisation.

Par Madeleine Luguel-Narboni

Le 22/11/2020


[1] Article L. 2152-5 Code de la Commande publique

[2] CE, 13 nov. 2020, n°432791, Lebon, cons. 3

[3] Ibid., cons. 3

[4] Ibid., cons. 5

Leave a Comment